Question orale à M. Borsus, Ministre de l’Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Innovation, du Numérique, de l’Aménagement du territoire, de l’Agriculture, de l’IFAPME et des Centres de compétences, sur « les quotas de cervidés imposés aux chasseurs ».
Mme Sobry (MR). – Monsieur le Ministre, par arrêté du 22 avril 1993, le Gouvernement wallon de l’époque a arrêté un plan de tir pour la chasse aux cerfs pour sauver l’espèce qui avait à ce moment-là un très mauvais état de conservation.
Ce plan de tir prévoyait à la base uniquement un quota de cervidés maximum à ne pas dépasser par les chasseurs. Grâce à cette mesure, la population de cervidés a fortement augmenté jusqu’en 2010.
En 2012, M. Di Antonio, ministre compétent à l’époque, faisait approuver par le Gouvernement une stratégie qui visait cette fois la réduction des populations de gibiers. Ce sont alors des quotas minimums de cervidés qui se sont vus imposés aux chasseurs, si bien qu’aujourd’hui la population est en chute de 25 % et plus, tellement ces minima à atteindre sont élevés.
Les quotas minimum imposés sont d’ailleurs tellement élevés que les chauffeurs disent ne plus savoir les atteindre. En effet, le plan de tir, tel que prévu à la base avait pour vocation de sauver l’espèce cerf, mais a aujourd’hui plutôt pour vocation de drastiquement diminuer la population des cervidés.
Devant ce constat que je trouve assez alarmant, ne serait-il pas opportun de revoir, voire de diminuer les quotas de cervidés imposés aux chasseurs afin d’endiguer cette réduction de la population des cerfs dans nos forêts wallonnes ?
M. Borsus, Ministre de l’Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Innovation, du Numérique, de l’Aménagement du territoire, de l’Agriculture, de l’IFAPME et des Centres de compétences. – Madame la Députée, votre question explique bien pour celles et ceux qui connaîtraient moins la situation du cervidé, quel est le cadre dans lequel on évolue. Il est exact, comme vous l’avez justement souligné, qu’à l’origine, en 1989, l’introduction générale d’un plan de tir au cerf en Wallonie était d’abord guidée dans le souci de préserver la population de cerfs, en particulier les cerfs boisés. Déjà en 1993, l’article 2 de l’arrêté du 22 avril 1993, qui organise le plan de tir aux cerfs en Wallonie prévoyait bien la possibilité de fixer des quotas de tir maximum, comme des quotas de tir minimum.
La fixation de quotas de tir minimum est une pratique qui remonte déjà avant les années 2010, mais il est vrai qu’elle a été plus systématique par la suite. Il y a effectivement une tendance à la diminution des populations de cerfs depuis 2010, mais elle est avant tout, m’indique-t-on, due à une évaluation plus correcte, plus robuste, des populations de cerfs sur pied et par conséquent à la fixation de minima de tir dont on me dit qu’ils sont plus pertinents. Parler aujourd’hui d’effondrement alarmant de nos populations de cerfs me semble, par contre, excessif.
En ce qui concerne les quantifications du nombre de cerfs, nous avons, au département de l’étude du milieu naturel et agricole, sur le site biodiversité, les rapports « cerfs » annuels qui sont mis en ligne. Même si le dernier de ces rapports remonte déjà à la saison de chasse 2016-2017 – donc il date un peu –, nous pouvons y observer que les indices d’abondance annuelle issue des recensements nocturnes aux phares – vous aurez toutes les précisions dans cette commission – opérations associant nos forestiers de l’administration et les chasseurs, montrent une situation nettement plus nuancée : dans la majorité des secteurs pour lesquels on dispose d’un recul suffisant, on estime qu’il y a 21 secteurs sur les 39 où l’on peut être dans cette situation d’un recul suffisant, on observe une stabilisation de la population de cerfs, une diminution dans dix secteurs, mais une augmentation dans huit autres. Là, c’est une situation assez contrastée.
Au niveau de l’estimation des populations, le rapport indique que l’on tournerait autour d’une population de 14 000 individus avant naissances, ce qui correspondrait à une densité moyenne de plus ou moins 45 bêtes aux 1 000 hectares de bois. On a toujours considéré, m’indique-t-on, une telle densité comme un maximum acceptable. En même temps, on me fait le témoignage, dans certaines situations, des dégâts que l’on observe à la suite d’une présence significative des cervidés.
On doit, me semble-t-il, être à la recherche d’un bon équilibre en ce qui concerne ces populations, avec un équilibre qui se traduit aussi dans les relations entre la population des cervidés et l’impact sur son milieu, sur son cadre de vie dans un certain nombre d’endroits. Il y a, à certains endroits, des déséquilibres entre la forêt et le niveau des populations de cerfs qui subsistent, m’indique-t-on, au point notamment même de remettre en cause le maintien de la certification PEFC, de gestion forestière durable, de plusieurs espaces forestiers.
Je voudrais encore indiquer qu’il n’entre pas dans mes intentions de plaider pour une quelconque diminution des quotas de tirs minimum qui me semblent raisonnables. Je souhaite cependant pouvoir rester en contact avec mon administration par rapport à cela, puisque vous savez que le fait de ne pas atteindre les quotas est un élément réprimé, en ce compris avec des sanctions pénales dans un certain nombre de cas. Tout cela peut être perçu de façon très négative par rapport aux interlocuteurs concernés.
Je voudrais encore vous indiquer que les décisions d’attribution de plans de tir, en ce compris les quotas minimums imposés peuvent faire l’objet d’un recours auprès de votre serviteur. Ces recours sont examinés par une commission d’avis dans laquelle on retrouve quatre chasseurs et trois forestiers. Jusqu’ici, dans la toute grande majorité des cas, le directeur général du SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement, qui a reçu délégation pour statuer sur ces recours, a toujours suivi l’avis de cette commission où les chasseurs sont majoritaires.
Dès lors s’il y a des endroits, des situations où l’on estime que les quotas, les plans de tir sont inadaptés, je rappelle l’existence de cette commission, de la possibilité d’un recours. En cette commission d’avis, mais dont l’avis est suivi par le directeur général dans l’ensemble des situations, m’indique-t-on, les chasseurs sont eux-mêmes très présents, au point d’être majoritaires.
Voilà un petit tour d’horizon très pédagogique pour celles et ceux qui connaîtraient moins les plans de tir du cerf. Voilà les explications que je voulais partager avec vous.