Question orale du 15/09/2020 de Mme Sobry à Mme Tellier, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal sur Les statistiques relatives aux retraits de permis de détention d’un animal
Mme Sobry (MR). – Monsieur le Ministre, on ne s’est pas concerté avec mon collègue, M. Matagne, mais on a beaucoup de similitudes dans nos deux questions. Il l’a dit, le décret qui est relatif au Code wallon du bien-être animal précise qu’un permis est nécessaire pour détenir un animal. Toute personne le détient de plein droit et de manière immatérielle pour autant que le permis ne lui ait pas été retiré de façon temporaire ou permanente en vertu d’une décision judiciaire ou administrative. J’ai vu, comme M. Matagne, les chiffres de la presse fin août qui évoquaient le fait que seulement 14 personnes en deux ans avaient été privées de ce permis de détenir un animal.
En parallèle à cela, j’ai plusieurs associations de protection animale qui m’ont interpellée sur le fait, comme il l’a dit également, qu’il n’existe, en tout cas pour elles, aucun registre qui liste les personnes qui se sont vues retirer ledit permis. Autrement dit, une personne qui a été privée du droit de posséder un animal pourrait tout à fait se rendre dans un refuge, adopter un chien, un chat, un cheval, alors que légalement elle n’en a pas le droit. Ce permis mis en place dans un but de protection et pour éviter les récidives, il perd toute sa raison d’être s’il ne permet pas aux associations de faire respecter les éventuels retraits. Pour pallier ce manque, les associations avec lesquelles j’ai discuté m’ont toutes expliqué qu’elles avaient créé leurs propres listes noires sur lesquelles sont repris tous les individus qui ont eu des comportements inadéquats en matière de maltraitance ou d’abandons multiples. Malheureusement, les circulations entre elles ne se font pas, ce qui fait que, dans la pratique, une personne peut abandonner son chien ou son chat le matin à Charleroi et puis se rendre dans un refuge à La Louvière l’après-midi même pour adopter un autre animal. Mes questions sont un petit peu similaires à celles de M. Matagne.
Madame la Ministre, comme lui, confirmez-vous ces chiffres repris dans la presse ? Pouvez-vous confirmer que les associations de protection n’ont pas accès à cette liste de personnes déchues de leur droit de détenir un animal ? Dans ce cas, pensez-vous pouvoir leur accorder un tel accès ? Serait-il envisageable de créer une base de données communes et accessibles à tous les refuges de notre Région pour ne pas confier un animal à une personne qui a déjà un lourd passif en matière de maltraitance ?
Mme Tellier, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal. – Madame et Monsieur les Députés, comme vous l’indiquez à travers vos questions, accueillir un animal est une responsabilité et nous devons nous montrer à la hauteur de celle-ci. C’est l’idée sousjacente à l’obligation de posséder un permis pour détenir un animal, en vigueur depuis le 1er janvier 2019. L’intention est totalement louable, mais malheureusement, comme vous le soulignez, cela fait partie des dispositions du code difficilement applicables à l’heure actuelle.
Je comprends que les refuges et les éleveurs souhaitent disposer des informations concernant ces retraits de permis. Néanmoins, comme je l’ai déjà indiqué dans le cadre de cette commission, les démarches normatives liées aux données sensibles ne s’improvisent pas. Il s’agit d’une matière technique complexe en matière de protection des données. Lors de l’adoption du code, l’Autorité de la protection des données n’avait pas été consultée concernant l’accès à la base de données relative aux retraits du permis. Or, il s’agit bien évidemment de gestion de données à caractère sensible. J’ai donc sollicité cette autorité sur base des dispositions actuelles du code pour disposer d’un avis sur le sujet.
Comme je l’ai rappelé en juin dernier, élargir l’accès à ces données pourrait nécessiter une modification du code, qui a par ailleurs été approuvé par le Parlement en octobre 2018. Une telle modification n’est, pour l’heure, pas d’actualité. Pour éviter l’acquisition d’un animal par une personne faisant l’objet d’un retrait de permis, une piste serait de suivre l’exemple du casier judiciaire. Dans ce cas, l’autorité publique délivre un extrait du casier judiciaire au titulaire de celui-ci, afin qu’il puisse le produire lorsque cela lui est demandé. Ce mécanisme pourrait apporter une solution, sans qu’un accès direct ne soit autorisé. Toutefois, un tel principe nécessiterait, lui aussi, une modification du code.
En conclusion, force est de constater que si le permis prévu par le Code du bien-être animal n’atteint pas sa cible, comme vous le soulignez, c’est parce qu’il n’est pas applicable, tel qu’il est prévu dans le code. Le Conseil d’État avait d’ailleurs lui-même mis en évidence que le permis ainsi envisagé n’en était en réalité pas un. Il serait dépourvu de tout contenu matériel et de toute portée véritable sur le plan juridique. Pour le reste, depuis janvier 2019, 2 028 procès-verbaux pour infraction au Code du bien-être animal ont été établis. Les parquets du procureur du Roi ont pris la main sur 124 dossiers, laissant les autres au fonctionnaire sanctionnateur régional. Pour ces dossiers, 17 mesures de retrait de permis ou d’interdiction de détention ont été prononcées. Pour les dossiers pris en charge par les parquets, mes services ne sont pas systématiquement avertis.
Vu la nécessité d’une communication efficace entre les différents services compétents, un courrier de rappel a été adressé par mes soins à la justice en ce sens afin d’œuvrer à une meilleure communication.