Question de Mme Sobry à Mme Linard, Vice-présidente du Gouvernement et Ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes sur «La transition numérique à grande échelle pour les arts de la scène»
Mme Rachel Sobry (MR). – Outre les douze heureux élus dont le spectacle a été capté par les médias locaux grâce à un budget de 275.000 euros dégagé par la Fédération Wallonie-Bruxelles, seuls les artistes, les compagnies et les lieux de spectacles reconnus ont pu jouir des moyens dégagés pour que la RTBF capte et diffuse leurs spectacles sur la plateforme Auvio. La plupart des acteurs des arts de la scène, en particulier ceux dont la notoriété et les moyens financiers sont moindres, restent toujours bloqués sans possibilité de se produire en public, ni de filmer, monter et diffuser un spectacle à un coût raisonnable. En effet, s’il leur est loisible de collaborer avec des sociétés privées, cela engendre des coûts importants. C’est pourtant ce qu’a choisi de faire le groupe belge de musique et de spectacles pour enfants, «Les déménageurs», par l’intermédiaire d’une entreprise spécialisée.
L’investissement financier est important puisqu’il est tarifé à partir de 2 300 euros hors TVA pour la captation du spectacle, auxquels il faut ajouter 75 euros mensuels pour la diffusion en ligne. Grâce à ce dispositif coûteux, le dernier spectacle de ce groupe a déjà pu être visionné par un millier de spectateurs, moyennant un paiement de 10 euros. Si ce modèle peut certes porter ses fruits, il nécessite malgré tout de gros investissements tant pour la captation du spectacle que pour sa diffusion sur une plateforme professionnelle permettant de conditionner la lecture à un paiement. Il reste donc inaccessible pour beaucoup d’artistes dont les rentrées financières de ces derniers mois ont été nulles ou presque.
En vertu de l’accès à la culture que vous souhaitez le plus large possible selon la Déclaration de politique communautaire (DPC), ne serait–il pas intéressant de se pencher sur la numérisation des arts de la scène à grande échelle ?
Les compagnies et les salles de spectacle ne bénéficiant pas d’une captation par la RTBF ou par un média de proximité sont-elles soutenues par la Fédération Wallonie-Bruxelles en vue de relayer leur art en ligne ?
Alors que certaines salles de spectacle ont déjà pris la décision de fermer leurs portes jusqu’à l’automne 2021, la diffusion en ligne leur permettrait-elle de toucher leur public tout en leur assurant quelques rentrées financières ?
Dans le contexte actuel, la diffusion en ligne est-elle devenue vitale pour les artistes et les troupes de spectacle ?
Une plateforme de diffusion des arts de la scène en ligne, soutenue par la Fédération Wallonie-Bruxelles, pourrait-elle voir le jour ?
Mme Bénédicte Linard, Vice-présidente du Gouvernement et Ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes. – Madame la Députée, le développement d’une politique culturelle numérique est une question importante qui mérite que l’on s’y penche sérieusement dans le cadre de l’accès et de la participation de tous à une diversité culturelle. Cette question ambitieuse, cohérente, raisonnée est d’ailleurs un des axes qui sont développés dans le rapport du groupe de réflexion «Un futur pour la Culture». Si le recours au numérique comme outil de diffusion des créations des artistes en Arts de la Scène peut être une alternative qui fonctionne pour certaines situations telles que la crise sanitaire aujourd’hui, il reste un chantier avec de nombreuses questions à résoudre en termes d’objectifs, de financement et de droits notamment. Le numérique est un outil de diffusion qui fait débat et qui ne rencontre pas nécessairement de consensus au sein des différents secteurs culturels.
Si les captations de spectacles et/ou représentations se révèlent utiles aujourd’hui, elles ne remplacent pas l’expérience collective d’une pièce de théâtre ou d’un spectacle vivant. Ni aujourd’hui ni demain. Mais les captations et les diffusions gratuites sur la plateforme Auvio de la RTBF et aussi sur les médias de proximité permettent d’amener le spectacle dans les foyers et de soutenir directement les artistes et techniciens. Il y a donc un chantier à ouvrir avec le secteur sur cette question, en prenant le temps d’analyser les avantages et inconvénients, sans perdre de vue que la captation n’est qu’un succédané qui ne remplace nullement l’expérience du spectacle dans une salle.