Question de Rachel Sobry à Philippe Henry, Ministre du Climat, de l’Energie et de la Mobilité: “La baisse de soutien aux grand installations photovoltaïques”
Rachel Sobry (MR) – Ce 9 juillet, la Fédération des énergies renouvelables « Edora » a publié sur son site un communiqué de presse consistant en un appel urgent à plus de transparence sur la méthodologie du soutien.
Ce communiqué fait lui-même suite à une communication du SPW Énergie prévoyant une baisse de près de 60 % du niveau de soutien aux nouveaux projets photovoltaïques de plus de 10 kilowatts-crêtes à partir du 1er septembre 2020.
Les acteurs du secteur comprennent qu’une baisse est nécessaire, eu égard, notamment, aux améliorations technologiques entrainant une diminution des couts d’investissement. Celle-ci est évaluable à environ 14 %, d’après Edora.
En revanche, ils ne comprennent pas l’ampleur de cette baisse du niveau de soutien. Celle-ci est bien plus importante que les adaptations bisannuelles précédentes et semble ne pas être particulièrement en phase avec la diminution des coûts d’investissement (60 % – 14 %).
En outre, Edora regrette qu’il n’y ait, à l’instar de ce qui se fait au nord du pays, une concertation avec les acteurs du secteur, ainsi que la mise en place d’un simulateur en ligne permettant de calculer le niveau de soutien.
La méthodologie de calcul menant à une telle baisse semble peu transparente tant il est compliqué de trouver et comprendre les facteurs qui mènent à une telle décision. Ce flou génère une réelle incertitude pour les porteurs de projet.
Rappelons que le photovoltaïque doit, selon l’accord de majorité, continuer à être soutenu et promu par le Gouvernement. Ainsi, la Déclaration de politique régionale prévoit que « le Gouvernement veillera à la poursuite de l’installation de panneaux solaires sur les toits et encouragera les opérateurs publics et les entreprises privées à réaliser des installations photovoltaïques de grande dimension ».
Le soutien du Gouvernement ne doit donc pas concerner uniquement les petites installations privées, mais également les grandes installations photovoltaïques qui ont un rôle tout aussi important à jouer dans la transition énergétique
Afin que la diminution de niveau de soutien prévue en septembre puisse être acceptée par tous, il convient de l’expliquer sans équivoque. Ces explications permettront également de comprendre comment, malgré la diminution annoncée, le Gouvernement continue à encourager les installations photovoltaïques.
Quelle a été la méthodologie de calcul utilisée pour aboutir à une baisse de près de 60 % du niveau de soutien ?
Comment justifier une telle décision au regard des prescriptions de la DPR ?
Dans l’attente de clarification, un maintien du taux actuel au-delà du 1er septembre est-il envisageable ?
Une concertation avec les acteurs du secteur a-t-elle eu lieu ?
Monsieur le Ministre peut-il me la présenter le cas échéant ?
Dans le cas contraire, sera-t-il possible, à l’avenir, de concerter les acteurs du secteur avant des modifications de grande ampleur ?
Philippe Henry, Ministre du Climat, de l’Energie et de la Mobilité – La méthodologie appliquée par l’Administration pour le calcul des coefficients kECO pour la période de réservation du 1er septembre au 31 décembre 2020 a été publiée par la CWaPE dans sa communication CD-18i29-CWaPE-0054 du 29 septembre 2018 sur les « coefficients économiques kECO applicables pour les différentes filières de production d’électricité verte à partir du 1er janvier 2019 jusqu’à l’entrée en vigueur du mécanisme réformé ».
Cette méthodologie est disponible sur le site de l’Administration à l’adresse https://energie.wallonie.be/servlet/Repository/keco-entre-le-1erjanvier-et-le-30-juin-2019.pdf?ID=54693
Le coefficient économique kECO est calculé, par filière, de manière à garantir le niveau de rentabilité de référence fixé par le Gouvernement wallon pour cette filière.Pour la filière photovoltaïque, le taux de rentabilité a été fixé à 7 % en 20 ans. De plus, l’AGW du 30/11/2006 prévoit spécifiquement pour la filière photovoltaïque une révision tous les 6 mois du coefficient économique kECO, afin d’adapter le soutien à l’évolution de différents paramètres dont entre autres les prix d’investissement et le prix de l’électricité. L’ensemble des paramètres pris en compte pour calculer le kECO des installations photovoltaïques de plus de 10 kW est repris dans le tableau 1 joint en annexe.
Comme on le voit dans ce tableau, les paramètres qui ont évolué depuis la dernière révision du kECO pour les installations solaires photovoltaïques de plus de 10 kW sont le prix de référence de l’investissement et le prix de l’électricité injectée.
Le prix de vente de l’électricité injectée n’a qu’un impact limité sur le kECO. On observe par exemple, dans le tableau 2 joint en annexe, qu’entre le 1er et le 2e semestre 2019, les seuls paramètres ayant évolué sont les prix de vente de l’électricité considérés pour l’année 1 et pour l’année 2. Leur augmentation importante (respectivement +18,71 % et +14,23 %) se traduit par une diminution limitée de 3,66 % du kECO.
À l’inverse, le prix de référence de l’investissement a un impact important sur le kECO. En effet, la formule économique utilisée pour le calcul du soutien est une actualisation de l’ensemble des flux entrants et sortants. Les flux des premières années ont donc un poids beaucoup plus important que ceux des dernières années. Si l’on compare avec le 2e semestre 2017, durant lequel le kECO avait été fixé à 1,53 (compte tenu d’un investissement de référence de 1323 euros / kWc et d’un prix de vente de l’électricité de 33,67 euros/MWh pour la première année et de 33,14 euros/MWh pour la 2e année), il est passé, pour le 1er semestre 2018, à 1,19, soit une diminution de 22,22 % pour une diminution limitée de respectivement 2,08 % et de 0.66 % du prix de vente de l’électricité pour l’année 1 et l’année 2 et d’une diminution de 8,01 % du prix de référence de l’investissement (1 217 euros/kWc). Pour le 2e semestre de 2018, le prix de vente de l’électricité a augmenté respectivement de 12,5 % et de 13,34 % pour l’année 1 et pour l’année 2 et l’investissement de référence a diminué de 7,48 % (1 126 euros/kWc). L’effet conjoint de ces évolutions s’est traduit par une diminution du kECO de 26,05 %.
Les paramètres technico-économiques (à savoir le coût de remplacement de l’onduleur) ont été revus pour les périodes de réservation à partir du 1er janvier 2019.
Le prix de référence de l’investissement n’a pas été adapté entre le 2e semestre 2018 et le 1er semestre 2020. Or il est ressorti de l’analyse des données récoltées via les dossiers de demande de réservation introduits auprès de l’Administration au cours de l’année 2019 que ce prix de référence avait baissé de 13,85 %, passant à 970 euros/kWc. Compte tenu de la sensibilité importante de ce paramètre sur le kECO, celui-ci a diminué de 59,49 % par rapport au semestre précédent, cette diminution ayant été quelque peu adoucie par la diminution du prix de l’électricité.
Pour conclure, je souhaiterais préciser que l’objectif de la révision semestrielle du kECO est d’apporter aux projets renouvelables le soutien qui leur est juste nécessaire et d’éviter toute surcompensation. Cette approche est tout à fait compatible avec la DPR et respecte ainsi le cadre des réglementations européennes en matière d’aides d’état.
Toutefois, il est important de noter qu’une révision importante du cadre global du régime de soutien à la production d’énergie à partir de sources renouvelables via l’octroi de Certificats Verts est en cours. Celle-ci vise également à améliorer les prévisibilités de l’évolution du soutien pour le secteur.
En ce qui concerne le maintien du taux actuel, un premier report de juillet à septembre de l’application de la révision semestrielle des coefficients kECO a été adopté. Celui-ci se justifie par le fait que les mesures de confinement ordonnées par le Gouvernement dans le cadre de la crise du coronavirus ont eu un impact généralisé sur la remise des études de détail, les offres de raccordement et l’obtention des permis et autorisations nécessaires. De plus, l’éventualité d’un report supplémentaire à une date ultérieure est actuellement également en cours d’analyse.
Mon cabinet entretient un contact permanent avec les représentants du secteur, qui ont à tout moment l’occasion de faire part de leurs positions. Les éléments qui nous sont communiqués sont ensuite analysés en collaboration avec l’Administration et le cas échant intégrés aux modifications des dispositions en vigueur.
Par ailleurs, il est important de souligner que la baisse du soutien que l’honorable membre mentionne dans sa question résulte de l’application d’une méthodologie préexistante et antérieure à mon entrée en fonction en tant que Ministre de l’Énergie de l’actuel Gouvernement wallon. Mon action se situe au niveau du cadre réglementaire (qui comme mentionné plus haut est bien en cours de révision) tandis que l’application des méthodologies adoptées par le Gouvernement revient au SPW.