Question écrite de Madame Rachel Sobry à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l’Energie et de la Mobilité
Monsieur le Ministre,
Le réseau électrique de Wallonie n’a initialement pas été conçu pour supporter l’injection d’électricité produite par des centaines de milliers de particuliers. Les perturbations du réseau sont donc devenues nombreuses avec l’arrivée massive d’installations photovoltaïques sur les toits des maisons.
Le problème est bien connu : Monsieur Dupont, sous le charme des nombreux avantages du photovoltaïque décide de franchir le cap. À sa grande surprise, il ne parvient pas à réinjecter le surplus d’électricité qu’il produit puisque l’onduleur se met en sécurité. La raison est simple : il y a surtension sur la ligne, le réseau est saturé.
L’injection du surplus d’électricité produite sur le réseau consiste pourtant en un des principaux incitants à l’installation de panneaux photovoltaïques. En outre, la mise en place du tarif prosumer pose question si le réseau électrique n’est plus efficacement exploitable.
La surtension varie d’un endroit à l’autre, notamment en fonction du nombre d’installations photovoltaïques, mais également en fonction de l’épaisseur des câbles du réseau. Alors que la Déclaration de politique régionale énonce que le Gouvernement veillera à la poursuite de l’installation de panneaux solaires sur les toits, il semble qu’une plus grande transparence quant à l’opportunité effective d’une telle installation est souhaitable.
Quelle est la position de Monsieur le Ministre quant à l’établissement d’une cartographie du réseau électrique qui permettrait d’informer les citoyens des risques de surtension ?
Les nombreuses interventions des gestionnaires de réseau rendent-elles ces cas moins fréquents ?
Réponse de Monsieur le Ministre HENRY Philippe
En effet, le réseau wallon connaît les mêmes problèmes que celui de nos voisins.
Les installations photovoltaïques chez des particuliers ont une puissance inférieure à 10 kWc. Pour cette gamme de puissance, l’installation n’est pas munie d’un dispositif de contrôle commande permettant au GRD de réduire ou d’interrompre la production. C’est l’onduleur qui, via une fonction de protection, peut empêcher l’installation de produire. Cette fonction est imposée au niveau européen et évite que l’onduleur augmente la tension dans l’installation intérieure et dans l’entourage du point de raccordement, ce qui pourrait occasionner des dégâts. Dès lors, s’il y a beaucoup de production sur un même câble basse tension et que celui-ci est long ou d’une section faible, cette protection peut être amenée à fonctionner. Il est à noter que, dès que le danger a disparu, l’onduleur se reconnecte automatique et reprend sa production.
Comme l’honorable membre le rappelle dans sa question, les réseaux de distribution ont à l’origine été conçus et dimensionnés pour alimenter les consommateurs depuis les unités de production d’électricité centralisées. L’évolution technologique et les objectifs de lutte contre le réchauffement climatique modifient progressivement cette réalité, en injectant également de l’électricité renouvelable sur le réseau depuis un nombre croissant de foyers et d’entreprises.
Les gestionnaires de réseau de distribution s’adaptent à ces nouvelles contraintes via des programmes d’investissements dans des renforcements de réseau et dans des outils informatiques et de télécommunication modernes (compteurs communicants, pilotage à distance du réseau, outils d’intelligence artificielle pour maximaliser les capacités d’accueil du réseau, etc.). L’objectif de ces programmes d’investissement est de réduire au maximum les risques de saturation du réseau et donc le déclenchement des onduleurs, tout en maintenant un coût de gestion du réseau (et donc des tarifs) soutenable structurellement.
Par ailleurs, lorsqu’une plainte introduite par un « prosumer » s’avère fondée, des travaux sont entrepris pour remédier à la situation. Il peut s’agir, par exemple, d’un changement du réglage du transformateur en cabine, de l’équilibrage des phases, du placement d’un Transformateur Zigzag, ou encore de l’assainissement du raccordement. Ce suivi fait l’objet d’un rapportage spécifique dans la partie « rapport qualité » du plan d’adaptation auprès du régulateur. À titre d’illustration, en 2019, ORES a reçu 569 plaintes dont 257 étaient fondées, parmi lesquelles 229 ont nécessité une adaptation réseau. Ce nombre est à mettre en relation avec les un peu plus de 125 000 « prosumers » que comptait le réseau d’ORES à la fin 2019.
Enfin, dans certains cas très localisés et spécifiques, le déclenchement de ces onduleurs est inévitable pour garantir le bon fonctionnement du réseau et éviter des problèmes de tension électrique dans une zone donnée, et ce, pour l’ensemble des clients, qu’ils soient équipés ou non de panneaux photovoltaïques.
Il faut savoir que les GRD ne peuvent pas s’opposer au raccordement de ces unités de production et qu’ils doivent mettre (raisonnablement) tout en œuvre pour garantir l’accueil de ces unités. Cet élément, couplé au fait que les citoyens ne peuvent choisir la cabine à laquelle ils vont être raccordés, explique le fait qu’il n’y a pas de cartographie des capacités du réseau mise à disposition des citoyens. Rien n’empêche cependant l’utilisateur du réseau de prendre contact avec son GRD pour s’informer avant d’effectuer son investissement. Il est par ailleurs à noter que, pour les installations importantes, les gestionnaires de réseaux ont l’obligation de publier sur leur site les capacités d’injections disponibles sur leur réseau.