Question orale de Madame Rachel Sobry à BORSUS Willy, Ministre de l’Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Innovation, du Numérique, de l’Aménagement du territoire, de l’Agriculture, de l’IFAPME et des Centres de compétences sur ” Les engagements financiers du protocole d’accord signé entre la SOGEPA, la SORESIC et le groupe Merlin “
Monsieur le Ministre,
Fin du mois d’août, la nouvelle que l’on espérait tous depuis plusieurs mois est tombée : le groupe Merlin va construire ce fameux parc Legoland et ainsi permettre à l’ancien site Caterpillar de se reconvertir, avec un engagement annoncé de plus de 1 000 travailleurs dès l’ouverture et des retombées économiques espérées dans toute la région, voire toute la Wallonie, notamment via le développement du tourisme, mon collègue libéral l’a évoqué. Il s’agit d’une opération exceptionnelle, je reprends l’expression choisie par l’économiste Joseph Pagano.
Si la Région wallonne, qui va effectivement investir via un apport en capital et en prêts, n’espère pas un return à hauteur de celui des biotechs, par exemple, elle semble rassurée par ce deal qui est « peu risqué » d’après les dires de votre cabinet. Vous avez d’ailleurs pu préciser, lors de la séance plénière il y a deux semaines, que la Wallonie deviendra ainsi copropriétaire, via la SOGEPA et la SFPI.
Un mécanisme de mise à disposition serait mis en place, moyennant rémunération. Les feux sont au vert, même s’il nous faut rester vigilants en attendant l’engagement ferme et définitif du groupe Merlin. Je souhaitais me tourner vers vous, Monsieur le Ministre, pour faire le point par rapport aux prochaines échéances pour la Région.
Le PTB se dit toujours être le grand défenseur de l’utilisation des deniers publics, donc j’aurais cru que le PTB se réjouirait qu’une clause de sortie existe, dans l’intérêt des finances wallonnes, de la SOGEPA et des montants publics que cette dernière va investir dans le dossier. Je ne doute pas que vous apporterez les éléments de réponse nécessaires sur ce point, Monsieur le Ministre.
J’en viens à mes questions.
Comment votre ministère et la SOGEPA œuvrent-ils actuellement au closing de ce dossier ?
Quelles sont les prochaines étapes de ce dossier complexe et ambitieux ? Pouvez-vous nous en dire plus quant aux engagements financiers de la Wallonie ? Quelle est la hauteur du return espéré par la Région wallonne ?
Réponse de Monsieur le Ministre Borsus Willy
Comme j’ai déjà pu l’indiquer, avec le projet d’implantation d’un parc Legoland à Charleroi, je pense que nous avons franchi une nouvelle étape potentielle à ce stade, dans le secteur fort des loisirs et du tourisme, qui est en constant développement en Région wallonne. L’écosystème wallon des loisirs est déjà bien développé.
Ce projet viendra le renforcer encore, et ce d’une manière assez spectaculaire. Lego est une marque forte, appréciée d’un grand nombre de personnes. C’est donc, me semble-t-il, une opportunité à saisir pour la Wallonie, à la fois pour l’emploi généré, la visibilité de notre Région, les retombées directes et indirectes, et donc l’économie de notre Région. Le projet de Legoland permettra en outre de participer à la poursuite d’un objectif majeur du Gouvernement, celui de réhabiliter nos friches industrielles.
L’ancien site de Caterpillar apporte aussi une réponse adaptée aux besoins exprimés par le groupe Merlin, tout en rencontrant une perspective de déploiement du bassin de Charleroi, et plus largement de la Wallonie, avec la création dès l’ouverture du parc d’environ 1 000 emplois, non délocalisables à l’évidence, et certainement davantage en raison de la croissance de ceux-ci et des emplois indirects. Comme le savent celles et ceux qui habitent la région, ce site est l’un des dossiers de reconversion des anciens sites d’activité industrielle désaffectés de Charleroi.
Par ailleurs, comme je l’ai souligné, nous investissons, mais ce n’est pas un subside qui est accordé, que ce soit par l’intermédiaire des fonds propres de la SOGEPA ou par l’intermédiaire de la filiale immobilière de la SFPI, nous devenons copropriétaires de l’infrastructure, copropriétaires du site.
Il y a deux sociétés, en ce qui concerne la structuration financière aujourd’hui préparée :
– il y a une société qui est la société propriétaire, la société immobilière. Appelons-la la Propco, pour utiliser des vocables habituels dans ce type de situation. Ce type d’organisation n’est pas inédite, je vous rassure ;
– puis, il y a une société opératrice, qui est alors le groupe Merlin. Nous n’avons pas la vocation, en ce qui nous concerne, de gérer ce type d’infrastructure de loisirs. La société immobilière Propco va détenir l’ensemble du site et des actifs construits.
Par ailleurs, la société opérationnelle, Merlin, 100 % Merlin pour cette société sera en charge de l’opérationnalisation du parc et aussi des investissements ultérieurs qui seraient menés sur le parc, parce qu’une trajectoire d’investissements complémentaires est annoncée.
La société propriétaire des actifs est une société fruit d’un partenariat public-privé où l’on trouve, d’un côté, la SOGEPA et la SFPI et, de l’autre côté, les investisseurs privés et le groupe Merlin. Par ailleurs, en ce qui concerne, l’organisation financière – elle a fait l’objet d’articles dans la presse spécialisée –, une redevance financière, un fee est payé depuis la société, c’est la société gestionnaire vers la société propriétaire, un intéressement en ce qui concerne l’évolution du chiffre d’affaires.
Vous allez m’indiquer que ce projet est risqué, les emplois, les sommes sont significatives. Je partage un certain nombre de précautions, d’analyses préalables, de questions par rapport à tout investissement de quelque nature que ce soit. Convenons, que ce soient d’autres dossiers antérieurs qui ont fait l’objet de pas mal de recherches depuis six ans – il y a à peu près six ans que Caterpillar a fermé ses portes –, un certain nombre de dossiers présentaient des perspectives, mais n’ont pas abouti pour différentes raisons, en ce compris le dossier qui était le plus médiatisé de construction de cette voiture électrique avec un partenaire chinois. Notons ici, si vous le voulez bien, dans la colonne indéniablement positive en termes d’analyse de ce projet d’investissement, le fait que le partenaire est à l’évidence extrêmement solide.
L’actionnaire principal de Merlin Entertainments est Kirk Bee, c’est-à-dire le family office de la famille fondatrice de la marque Lego. C’est un groupe qui investit beaucoup dans d’autres parties du monde et qui a, par ailleurs, traversé la période covid avec la fermeture ou la restriction très forte de fréquentation des parcs d’activités, avec un certain nombre de marques très connues qui figurent dans le portefeuille de ce groupe privé. En outre, convenons que le risque de délocalisation d’un parc est, par nature, sensiblement plus faible que pour d’autres activités.
Notons également que les partenaires ont, à l’évidence, une expérience très forte en ce qui concerne le développement de parcs de loisirs, notamment de parcs Legoland, qui leur permet d’avoir une bonne appréhension, à la fois des enjeux, des difficultés et des challenges liés à ce type d’activités. Un certain nombre d’études externes ont été réalisées pour valider la faisabilité technique et financière, ainsi que d’autres éléments liés à ce projet tel une structuration du projet avec cette société opératrice et la société immobilière propriétaire qui est donc une joint venture entre Merlin SOGEPA et la SFPI.
C’est une structuration permettant une rémunération fixe, très majoritairement et avec complément en ce qui concerne l’intéressement au chiffre d’affaires. Par ailleurs, il y a aussi l’intégration de l’inflation dans la rémunération. Ce qui est une préoccupation bien légitime, en cette période. Vous avez évoqué la question de la clause de sortie. Elle est mutuelle et concerne les deux partenaires potentiels parce que, chacun l’a bien compris, on est dans un contexte d’incertitude relative aux prix de la construction, avec un accroissement des coûts d’investissements et un impact sur la rentabilité. Je rappelle qu’à ce stade l’accord n’est pas signé. Chacun des partenaires, lors de la conférence publique, l’a exposé de façon très transparente, en disant : « Voilà très précisément, où nous en sommes, et voilà les intentions des partenaires, mais nous fixons, grosso modo, la fin de cette année pour décider du closing de l’opération et d’un go/no-go qui pourrait être temporaire eu égard à la période chahutée que nous connaissons du point de vue socioéconomique ». Cependant, les discussions continuent de façon active aussi bien concernant les volets technique, budget et cadre contractuel.