Question d’actualité de Madame Sobry à Madame Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes sur “L’éventuelle mise à l’emploi de sans-papiers pour pallier les pénuries“
Madame la Ministre,
La pénurie est une réalité pour beaucoup de secteurs en Wallonie : 158 métiers sont actuellement en manque de candidats, soit 10 % de plus que l’année dernière. Afin de contrer cette pénurie, vous avez récemment plaidé avec le ministre-président auprès du Premier ministre pour une régularisation des sans-papiers dont les compétences feraient défaut dans notre Région.
Cette proposition a visiblement surpris pas mal de monde, y compris vos collègues du Gouvernement, et n’est d’ailleurs pas reprise dans la Déclaration de politique régionale.
Je peux comprendre que la conjoncture et les résultats mitigés de certaines mesures développées poussent à la créativité, mais j’espère que l’on ne détourne pas le regard de ce qui est – et, j’espère, reste – la priorité, à savoir la mise à l’emploi de nos demandeurs d’emploi.
Si l’objectif d’apporter une réponse aux pénuries que nous connaissons sur notre territoire est louable, je me suis étonnée de cette proposition qui semble faire fi du fait qu’il y a sur notre territoire plus de 223 000 demandeurs d’emploi.
Comment allez-vous, avec cette proposition de régularisation des sans-papiers, combiner les impératifs de mise à l’emploi de nos demandeurs d’emploi et de réponse aux pénuries que l’on connaît en Wallonie ? Je vous remercie.
Réponse de Madame la Ministre
Les pénuries et le taux d’emploi en général sont un sujet multifactoriel, complexe, et l’on va essayer de sortir des simplismes dans lesquels, parfois, à travers des punchlines, certains veulent nous emmener. Je pense que la sérénité des débats et l’enjeu valent largement un peu plus de travail, de profondeur, d’humilité, mais aussi de volontarisme et de convergence des luttes pour aboutir ensemble à faire avancer l’enjeu des pénuries et ce taux d’emploi.
Nous avons, sous cette législature, au sein de ce Gouvernement, concentré énormément d’efforts pour réformer des dispositifs d’aide à l’emploi et à la formation. Nous avons cherché des solutions qui étaient non classiques. Je pense notamment à ces permis de conduire que nous avons proposés, puisque nous savons qu’à peu près 56 % d’offres d’emploi sur le site du FOREm exigent le permis de conduire. Or, on a au moins un demandeur d’emploi sur deux qui n’a pas le permis de conduire. Comme c’est un prérequis, il faut essayer de les aider à mettre ce pied à l’étrier. Nous avons donc débloqué des moyens que nous ajustons au fur et à mesure pour essayer que la mesure soit la plus opérationnelle et la plus efficace possible.
Nous avons pris des décisions ensemble au sein de ce Gouvernement pour pouvoir améliorer également des formations : en faisant des formations qui soient plus courtes, en organisant des formations avec Wallonie Compétences d’avenir, en organisant des formations qui permettent de rentrer plus rapidement sur le marché de l’emploi et en faisant des stages en entreprise. Nous avons doublé le montant pour les stagiaires qui sont en formation de 1 à 2 euros de l’heure pour éviter cet effet de perte de salaire très importante qui découragerait des demandeurs d’emploi à suivre des formations. Nous sommes passés, pour des métiers en pénurie, à une aide de 350 euros pour les personnes qui rentrent dans ces formations.
Nous sommes passés à 2 000 euros pour des gens qui rentrent dans des formations, notamment de la construction, qui sont principalement en pénurie. Les efforts que nous avons consentis au sein de ce Gouvernement sont donc importants. Même si je n’ai pas été exhaustive, je voudrais en finir, en tout cas dans les exercices que nous avons déjà réalisés, par une réforme énorme, une réforme d’ampleur, une réforme qui change la manière dont on demande une approche du FOREm qui coache, qui aide les demandeurs d’emploi à trouver des solutions. Le marché de l’emploi est parfois quelque chose de compliqué, d’abstrait, pour lequel il faut pouvoir mettre sur les rails, proposer des solutions, aider à bien se présenter.
Nous avons des dispositifs qui ont été mis en place, des jeux de rôles qui sont organisés pour que les gens se présentent et apprennent à se défendre, des petits modules de formation. Nous demandons une évaluation au fur et à mesure de cette réforme de l’accompagnement. Nous suivons cela de très près – nous en parlerons probablement dans les prochaines réunions de Gouvernement, dans les prochains Conseils des ministres – pour voir quelle implémentation de cette réforme nous avons voulue, parce que nous souhaitons effectivement voir des résultats engrangés.
Ensuite, j’ai été très souvent interpellée par des députés sur le fait que, par exemple, nous ne délivrions pas assez de permis de travail pour des personnes étrangères qui résident en Belgique et particulièrement en Wallonie, comparant par exemple des dispositifs avec la Flandre, qui délivrait beaucoup plus de permis de travail. J’avais répondu deux éléments : – nous devions réformer le dispositif pour le faciliter, ce que nous avons fait puisque la Wallonie vient d’approuver une modification sur le permis de travail qui a été validée et approuvée au Gouvernement lors de la dernière séance aux alentours du 21 juillet dernier et qui devrait faciliter les choses ; – l’Union wallonne des entreprises, l’Union des classes moyennes, les organisations syndicales attirent notre attention sur le fait que, dans le secteur de la construction, dans le secteur de l’HORECA et dans d’autres secteurs encore, il existe aujourd’hui des gens qui travaillent sans reconnaissance, sans contrat de travail, en raison de la situation administrative dans laquelle elles se trouvent.